La musique : un droit pour l'enfant ?

Poids et pratique du droit à la musique au Québec

‘C’est important pour les enfants d’avoir le droit à la musique.’

Cette affirmation se trouvait en page d’introduction à un cahier spécial de Le Devoir (13 novembre 2011) sous le titre MUSIQUE À L’ÉCOLE. Attribuée à la présidente de l’Association de musicothérapie du Canada, cet appel au droit de l’enfant était située en contexte d’une musique qui établit un ‘pont entre l’enfant et le monde extérieur’, comme langage préverbal de l’émotion et de la communication au-delà des mots, comme langage qui fait appel à la créativité de l’enfant et qui tente d’échapper aux barrières du cognitif. L’enfant concerné était celui qui présente ‘une déficience physique, un déficit cognitif, un trouble psychique, un trouble de développement ou d’apprentissage ou un trouble du langage ou de la communication’. De plus, en cours de texte, était annoncée la tenue d’une journée (17 février 2012) sur le droit des enfants à la musique organisée par l’Université Concordia ‘grâce à une subvention de Patrimoine Canada’.

Écrites à la veille du congrès annuel de la Fédération des Associations de musiciens enseignants du Québec (FAMEQ - ... nov. ... 2011), les pages suivantes de ce cahier MUSIQUE À L’ÉCOLE recensaient plus largement les milieux et les organismes qui prennent en charge la ‘mission’ d’enseigner la musique à tous les enfants d’âge scolaire.

Ce qu’on y trouve pourrait être encourageant pour qui désire avoir un rappel rapide des initiatives et des pratiques musicales offertes en éducation au Québec. Il y est fait mention de l’Institut Orff. Du Centre de musique canadienne (CMC), on signale un souci d’intéresser ‘les compositeurs à écrire pour les ensembles scolaires’ et l’existence d’un protocole CMC-Québec touchant les musiciens éducateurs. De même, une coopération entre FAMEQ et la Société de Musique Contemporaine de Québec (SMCQ) vise entre autres la création d’œuvres pour chœur et harmonie scolaire. L’école de musique Schulich, affiliée à l’U. McGill, forme les étudiants se dirigeant vers une carrière ou vers une profession d’enseignement au primaire et au secondaire ; on regrette pourtant que ‘peu de Québécois’ sont inscrits dans ces classes. Le Laboratoire Mus-Alpha (U. d’Ottawa) développe une expertise en apprentissage musique-langage pour les enfants préscolaires. Finalement, plus immédiatement présents dans des classes d’enfants, sont rapportés les exemples de certaines écoles qui ont des projets éducatifs en musique et qui tentent de faire un aménagement spécifique des horaires à l’intérieur de ‘la liberté de choix parmi les arts plastiques, dramatiques et musique’.

Ces mêmes aperçus sur la MUSIQUE À L’ÉCOLE deviennent intrigants pour qui s’arrête à l’affirmation initiale d’un droit de l’enfant à la musique, à la nature de ce droit, à son importance, à son étendue, à l’obligation d’en fournir les services à tous les enfants, dans toutes les écoles, par des enseignants qualifiés, selon des programmes, des horaires et des suivis pédagogiques orientés vers des résultats éducatifs et cognitifs de qualité.

En bref, de quel droit s’agit-il, à qui s’adresse-t-il et qui est concerné dans son application ?

Se référant à la Déclaration universelle des droits de l’homme (1948 - 26.1.2.3), on penserait qu’il est question d’un droit évoqué pour le bénéfice de tous les enfants tout autant qu’à ceux ciblés pour une thérapie, au-delà de l’insuffisance des ressources, d’un droit rattachée à la finalité éducative et sociale de l’école en toute égalité avec l’importance présentement accordée à l’accumulation des connaissances techniques. Plus récemment, on pourrait songer à la Convention relative aux droits de l’enfant, ces droits culturels d’être éduqué.

Mais ces énoncés sont-ils encore trop loin de la réalité !

Et là, non seulement les écoles et les commissions scolaires sont interrogés, mais encore le ministère de l’Éducation, des Loisirs et des Sports du Québec (MELS) est mis en cause. Ce dernier est tout d’abord interpelé pour l’amélioration de la situation de l’enseignement des arts en général : musique, théâtre, danse et arts plastiques. On indique qu’une rencontre avec des représentants du MELS a été obtenue et tenue en mai dernier (2011) et qu’une table de travail se penchera sur certaines recommandations dans le but de produire un avis qui sera déposé ‘probablement’ au printemps prochain (2012) au MELS.

Pour la Fédération des associations de musiciens éducateurs du Québec (FAMEQ), il semble y avoir plus à engager et avec plus d’urgence. Elle souhaite que le ministère ‘intervienne le plus rapidement possible (... ‘d’ici janvier’) auprès des commissions scolaires pour que de nouvelles directives soient données aux écoles’. Par la suite, elle ne parle pas seulement de changements affectant la nécessaire continuité disciplinaire, le temps alloué, la répartition des heures de cours propice à un apprentissage signifiant et même une réelle accessibilité pour tous les enfants à la musique. Elle a en vu un changement au niveau du régime pédagogique. Si la présidente de la FAMEQ croit que ses membres sont ‘très heureux de l’ouverture du MELS, qui a accepté de nous écouter’, elle n’espère pas moins que les fruits seront bientôt à leur portée. ‘Les enfants ont le goût de faire de la musique.’

En somme, la lecture du cahier spécial MUSIQUE À L’ÉCOLE laisse entière la question du poids et de la pratique du droit à la musique pour tous les enfants du Québec, si toutefois il est connu et reconnu.

Marcel Ross, 1 déc. ‘11