La violence , un phénomène qui prend de l’ampleur dans nos écoles

Introduction :

La violence c’est ce qui agit sur quelqu’un contre son gré ou ce qui fait agir quelqu’un en utilisant la force. La violence est le baromètre des rapports entre les hommes. Elle est liée aux respect des droits humains car à chaque fois qu’un droit est violé, il y’a violence. Mis à part les casses consécutifs aux mouvements de grève et le châtiment corporel la violence était inconnue dans nos écoles . Aujourd’hui c’est un phénomène qui prend de plus en plus de l’ampleur dans l’enceinte scolaire. L’école Sénégalaise est aujourd’hui traversée par des zones de turbulences qui font réfléchir tous les amis de l’école, tous ceux qui veulent faire de l’école un instrument de paix. Ses manifestations sont diverses et les causes multiples. Mais comment la prévenir à l’école ? Comment faire en sorte que les conflits soient résolus pacifiquement  ? Comment amener les composantes de la famille scolaire, les membres de l’administration, les enseignants , les élèves, les parents d’élèves, à dialoguer , à faire de l’école une société démocratique, avec ses normes où règnerait le respect mutuel pour un mieux vivre ensemble ?

A/La violence : manifestations et causes

La vie en société est souvent source de conflits en raison des intérêts divergents, des besoins et des valeurs qui ne sont pas toujours les mêmes. L’école est une institution de la société, elle reproduit souvent ses conflits de valeur, ses problèmes. L’école Sénégalaise société en miniature n’est pas en reste . Les conflits éclatent souvent entre acteurs de l’éducation, élèves, enseignants, membres de l’administration et parents d’élèves. Ils sont souvent résolus par la violence avec diverses manifestations :

-violence verbale ou psychologique avec des injures entre élèves , élèves et enseignants. Ils sont légion les élèves qui sont victimes de cette forme de violence de la part des enseignants . Très souvent quand ils ne peuvent plus supporter humiliations et critiques , ils abandonnent l’école.

-le harcèlement sexuel, la discrimination sont une autre forme de violence que l’on retrouve en classe et à l’école. Les filles et certains élèves handicapés sont les plus exposés à cette forme de violence. Ceux ou celles qui osent tenir tête à l’enseignant se voient octroyer de mauvaises notes et renvoyés.

-Le viol : Phénomène très isolé dans les écoles , inconnu dans certaines localités . Il y ‘a un exemple récent : une élève a été victime d’un viol collectif de la part de ses camarades dans une grande ville .

- les mouvements de grève  auxquels participent souvent des délinquants non élèves se terminent souvent par des casses , du vandalisme caractérisé. Les élèves s’en prennent souvent aux édifices publics, aux cabines téléphoniques, aux bâtiments de l’école, aux matériels pédagogiques, hélas !

- les vols , les rackets se rencontrent surtout dans l’école primaire .Des bandes d’élèves sont s’adonnent à ces extorsions et ceux qui ne s’y plient pas sont souvent battus.

-châtiments corporels : c’est une pratique très courante dans les écoles sénégalaises .Pourtant le décret le décret no72-861 portant organisation de l'enseignement primaire élémentaire en date du 13 juillet 1972 et publié dans le journal officiel no 4274 du 1er février 1973 interdit le châtiment corporel . L'article 14 du chapitre III stipule que les seules punitions autorisées sont: la réprimande verbale, la retenue après la classe, l'exclusion temporaire de 1 à 8 jours et l'exclusion définitive . Les conséquences sont souvent graves ; Dans la ville de Rufisque à 30 km de Dakar , un instituteur et une institutrice ont été mis en garde à vue suite à des blessures infligés à deux élèves, l’une une fillette de 8 ans a perdu un œil, l’autre un garçon a toujours des complications à l’œil. A la Zone A un quartier de Dakar, un parent d’élève a traduit en justice un enseignant qui a battu son fils. A Bambey un ville située à 100km de Thiès , un élève a poignardé son maître.

-L’apparition des armes blanches (couteau, coupe-coupe etc..) dans nos écoles est très inquiétante et témoigne de l’ampleur du phénomène.

En effet le renouvellement du bureau du foyer -socio éducatif dans les collèges et lycées est l’occasion d’âpres affrontements entre factions rivales, qui n’hésitent pas à en venir aux mains à user de gourdins, de couteaux plongeant ainsi l’établissement dans une atmosphère de violence avec l’intervention de la police. Ces factions rivales sont souvent l’émanation de partis politiques rivaux qui utilisent l’espace scolaire pour s’affronter. Au lycée Malick Sy de Thiès durant l’année 2002, un élève a poignardé son camarade à la suite d’une petite altercation.

les causes de ces violence sont multiples :

-les conflits interpersonnels qui se reflètent dans les relations avec les autres peuvent entraîner la violence. Les élèves n’ont d’autre alternative que la violence dans le règlement des conflits interpersonnels.

- La reproduction des comportements appris dans la famille, dans la société mais surtout au cinéma et à la télévision est souvent source de violence. Des enfants qui vivent un drame à la maison ont souvent des comportements violents à l ‘école .Les médias(radios, journaux, télévision) y contribuent pour beaucoup . Ils rapportent des situations de crise où l’usage unilatéral de la force semble la méthode la plus employée pour traiter les conflits ; un fort pourcentage de drame télévisé destinés tant aux jeunes qu ‘aux adultes étale la violence et présente la coercition comme moyen acceptable et commode d’éliminer les conflits.

- Le surpeuplement des écoles avec des classes pléthoriques. (jusqu’à 100 élèves) , la surcharge de travail, sont autant de motifs d’énervement des maîtres qui ont toujours les nerfs tendus et n’hésitent pas à utiliser le bâton.

- La démission des parents dans l’éducation des enfants aggravée par le chômage, la pauvreté qui les rendent incapables d’ acheter les fournitures et payer certaines taxes (droit d’inscription, gardiennage, construction de classes etc..) favorisent les comportements violents à l’école et la délinquance juvénile.

-les fournitures et bourses scolaires qui n’arrivent pas à temps aux destinataires, le manque de professeurs, de tables bancs et de matériels scolaires , sont autant de raison qui poussent les élèves et étudiants à aller en grève et à s’adonner à des casses.

-le laxisme de certains enseignants favorise aussi la violence des élèves qui s’adonnent la violence verbale et physique en classe .

- l’absence de dialogue entre membres de la famille scolaire est toujours source de tensions. Dans certaines écoles, l’administration ne favorise pas le dialogue, ce qui conduit à une incompréhension et aux conflits.

-L’absence ou le non fonctionnement des structures démocratiques devant favoriser la concertation, le dialogue amène souvent les élèves ou le enseignants à trouver d’autres voies pour se faire entendre. Dans certains collèges , le foyer socio-éducatif ne fonctionne pas sous prétexte que c’est un lieu qui prépare à la grève.

-Les règlements scolaires imposés ou " parachutés , élaborés sans les élèves et faisant fi de leur réalité provoquent de graves conflits entre acteurs de l’éducation. Au lieu d’ une charte des droits et des responsabilités , les écoles affichent des règlements scolaires standard, souvent dépassés.

-La non intégration des principes du droit dans les pratiques éducatives. L’école est au fond une zone de non droit, où chaque acteur a comme qui dirait sa propre logique..

Au total les causes de la violence à l’école sont multiples et souvent liées aux problèmes que vivent les enfants dans leurs familles, à la pauvreté , aux conflits entre acteurs de l’éducation , au fonctionnement incorrect des structures démocratiques (foyer, coopératives etc ..) à l’absence de structures de dialogue , au manque d' équipements dans les établissements scolaires .

B/Comment prévenir la violence ?

Une analyse approfondie de la violence montre que mises à part les causes externes liées aux allocations des élèves, au manque d’enseignants et de mobiliers scolaires , les autres causes résultent des conflits interpersonnels entre élèves et professeurs, élèves et administration, dans une moindre mesure entre enseignants et membres de l’administration .

Il s’avère donc nécessaire si l’on veut assurer un mieux vivre ensemble à l’école de s’attaquer à ces conflits interpersonnels qui relèvent pour l’essentiel du respect de l’autre dans le cadre global du respect de la règle construite par tous les acteurs de l’éducation à l’école. S’appuyer sur le droit de toute personne au respect de son intégrité physique et psychique est donc le fondement de tout règlement pacifique des conflits.

Il s’agit de faire de l’école une société de droit  avec l’ instauration du respect mutuel, d’apprendre les normes élaborées ensemble , d’utiliser le dialogue, la concertation et faire fonctionner les instances et les procédures instituées :

Par exemple il faut redonner au foyer un rôle plus actif dans nos écoles : Le foyer doit dépasser l’organisation d’activités parascolaires (fêtes, sports, activités culturelles etc) et s’occuper de tâches plus essentielles comme la supervision du journal, élaborer et réviser le règlement intérieur, élaborer le projet éducatif, faire de la médiation.

La coopérative scolaire doit fonctionner correctement et permettre la responsabilisation des élèves

L’école devra élaborer une charte des droits et des responsabilités  qui s’inspire des valeurs que le projet éducatif veut promouvoir.. C’est une liste de droits et responsabilités à assumer élaborés et approuvés démocratiquement.. L’école doit comme tout milieu de vie se doter de règles susceptibles d’en garantir le bon fonctionnement. Elles doivent être discutées  pour permettre un mieux vivre ensemble ; elles doivent illustrer quelques comportements attendus et souhaités. Un comité de médiation pourrait être installé .Il explorera tous les procédés de résolution des conflits notamment la médiation, la négociation, le partage, l’alternance, l’explication, l’écoute active, l’excuse, le compromis, le hasard .

.En classe systématiser l’enseignement des droits de l’homme et de la paix avec des approches qui favorisent les valeurs et les principes fondamentales qui fondent les droits humains, (solidarité, liberté, tolérance, égalité respect mutuel etc..)

-Certaine structures doivent être crées si elles n’existent pas comme le conseil de coopération qui se réunit une fois par semaine qui permet de résoudre les problèmes , les conflits, de faire des projets.

-Au niveau individuel , il faudrait changer d’attitudes, de comportements, et nos façons de régler les conflits.

Conclusion :

Les conflits naissent à l’école parce que c’est une société où les hommes sont en interrelation. Ces conflits cependant doivent être résolus de façon non violente. Pour cela il faut respecter les principes du droit et mettre en place des lieux de parole, de résolution des conflits.

L’application de ces principes, la mise en place de ces structures concourent à l’apprentissage de la démocratie et participent d’une citoyenneté active . L’école doit préparer les jeunes à vivre dans une société basée sur un contrat social qui vise à rendre compatible les libertés individuelles et l’organisation sociale.

Toutes ces mesures permettront non seulement la réduction de la violence dans les écoles mais constitueront un outil efficace d’apprentissage de la citoyenneté démocratique.

 

EIP-Sénégal